vendredi 29 janvier 2016

J'envisage de te vendre (j'y pense de plus en plus), Frédérique Martin




L'histoire : Imaginez un monde où nos valeurs n'ont plus de valeur, où un homme peut vendre sa mère comme on se débarrasse des vieilleries lors de vide-greniers, où un couple peut commander la naissance de son enfant comme il prévoit ses vacances, un monde où la famille des victimes peut décider de la sentence d'un tueur en série, et où un homme qui déménage est fliqué par son voisin. Effrayant, non? 
C'est l'univers dans lequel Frédérique Martin plonge son lecteur dans ce recueil de nouvelles au titre percutant. 








Mon avis : Comme je l'attendais, ce recueil-là! 
Déjà, on ne peut passer à côté de ce titre qui laisse perplexe, qui intrigue. C'est ce qui a d'abord attisé ma curiosité. 
Comme j'aime particulièrement le genre de la nouvelle, je me suis donc précipitée. J'aime l'idée de la relative frustration qui se crée à la fin de la lecture d'une nouvelle : on s'est laissé emporter par l'intrigue posée en quelques pages, on s'est attaché aux personnages, et puis... bam... tout est fini. Mais c'est pas grave, il n'y a qu'à tourner la page pour plonger dans un tout autre univers. 
Sauf que... 
A la fin de la première nouvelle, celle dans laquelle un trentenaire décide de vendre sa mère au plus offrant, on accuse le coup. Tant de cynisme, ça fait grincer des dents. Et ça laisse un petit goût amère qui peine à s'estomper. 
Mais j'ai tourné les pages, encore et encore... 
On voudrait dévorer ce recueil, le lire d'une traite. Sauf que c'est lui qui vous dévore. Il vous attrape et vous tire vers un monde dans lequel vous ne vous imagineriez pas vivre une seule seconde. Chaque nouvelle vous y enfonce un peu plus. A chaque fin d'histoire, il m'a fallu un peu de temps, un temps pour reprendre mon souffle, pour digérer.
En fait, Frédérique Martin réussit un tour de magie : chaque nouvelle vous effraie davantage, et pourtant, vous ne pouvez vous empêcher de continuer. C'est comme quand vous étiez petit, les histoires du soir faisaient un peu peur, mais c'était tellement grisant... 
Sauf que... 
Ce monde, dans lequel évoluent les personnages de Frédérique Martin, n'est pas celui des contes de fées. C'est un monde où la liberté n'est plus, ou les gens sont fliqués, jugés, soumis, à toutes sortes d'autorités qui les briment parfois sans qu'ils en aient conscience. Le pire? Les personnages, les situations sont si actuels qu'ils en deviennent terriblement proches. Et si c'était notre avenir que l'auteur dessinait sous nos yeux consternés? 
En résumé, un recueil troublant, tout en profondeur, qui ne manque pas d'interpeller et de poser de bonnes questions. 

Ce fut également un vrai régal de retrouver la plume douce et délicate de Frédérique Martin. Beaucoup de douceur, notamment dans la nouvelle qui traite de la mort, et de la sobriété aussi, dans celle sur le tueur en série. J'ai aimé ce mélange. 
En lisant, j'entendais la voix juste et posée de l'auteur, et je me suis revue un certain jour d'été dans un petit village du Tarn à écouter de précieux conseils d'écriture. 

Un recueil qu'il est urgent de découvrir. 
Et une lecture que je partage avec la jolie Laurie

2 commentaires:

  1. Sauf que tu modifies le titre et ça me fait rire...pourquoi 'songer' plutôt que 'penser' ? Intéressant. Tu as raison sur la frustration à la fin de chaque nouvelle. Tu en parles très bien. Quel beau moment tu as dû passer avec l'auteure...merci pour cette lecture commune !

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  2. Un régal ce recueil, et comme je vous envie ! Cet atelier d'écriture devait être génial...!

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