samedi 25 octobre 2014

Mommy, Xavier Dolan

L'histoire : Depuis le décès de son mari, Diane élève seule son fils Steve, ado impulsif et violent, après son exclusion de l'institut spécialisé dans lequel il avait été placé. Le quotidien s'avère très difficile, jusqu'à l'arrivée de Kyla, énigmatique voisine qui vient soutenir la mère et le fils. Le trio va tenter de trouver un équilibre bénéfique à chacun. 














Mon avis : Ce film est un choc, à tous points de vue. 
Dolan ose un cadrage serré, sur écran carré, d'abord très perturbant pour le spectateur. 
Dans cette atmosphère étriquée, on assiste, impuissants et sonnés, à la tornade Steve qui s'abat sur la vie de Diane. Entre humour vache, empoignements violents et colère hystérique, la valse des émotions est omniprésente. Si vous allez au ciné pour passer un moment peinard dans votre fauteuil, ce film n'est pas pour vous.  C'est un tour de manège digne des montagnes russes qui dure plus de deux heures. 

Et pourtant, on ne voit clairement pas passer les deux heures. Tout simplement parce qu'on passe du rire aux larmes quasiment à chaque scène. La gouaille de Diane et les expressions québécoises quasi incompréhensibles font sourire, tandis que la peur et la tristesse qui se lisent dans ses yeux fendent le coeur. Anne Dorval est magistrale dans le rôle de Diane, fragile et si pleine d'espoir, prête à tout pour Steve. 
Le reste du casting est une réussite. Antoine Olivier Pilon qui joue Steve est terrifiant et tout bonnement incroyable dans le rôle de cet enfant terrible, que seule Kyla, interprétée par Suzanne Clément, parvient à calmer, au prix d'une scène, là encore, très surprenante par sa violence maîtrisée. 
Si ce trio fonctionne, c'est qu'il repose sur trois destins brisés, qui tentent de se soutenir pour ne pas sombrer. Diane a perdu son mari et son travail, Steve son père. L'une est tour à tour effrayée, impuissante ou agressive comme une lionne, et surtout pleine d'espoir ; l'autre est en pleine crise identitaire. Adorant et rejetant sa mère, désireux de la protéger, d'être le seul et l'unique pour elle, Steve est en même temps à un moment crucial de sa vie. Il se cherche, teste ses limites et a besoin de s'affirmer... 
Quant à Kyla, elle génère autour d'elle le mystère, sur sa situation, sur son comportement. Son monde est bancal, et c'est ce qui fait qu'elle s'accorde si bien avec le duo Diane-Steve : elle s'immisce dans leur vie sans qu'on s'en aperçoive, comme si elle prenait naturellement une place qui lui revient de droit. 

Le scénario enchaine donc des scènes extrêmement fortes et des scènes d'une poésie intense. Le cadre de l'image s'agrandit quand l'horizon des personnages s'éclaire, et ce choix-là est tout simplement magnifique et d'une justesse incroyable. 
Malheureusement, le bonheur est de courte durée pour le trio. Les problèmes s'accumulent et Diane fait tout ce qu'elle peut pour éviter de confier à nouveau Steve à un institut médicalisé. 
Le spectateur lutte avec elle, avec cet espoir dont elle parle tant, même lorsqu'elle prend l'ultime décision qui la libère.
Le tout est relevé par une bande originale variée mais qui sonne juste à chaque fois. De jolis moments sur les morceaux de Dido par exemple.

La fin en elle-même a provoqué entre mes amis et moi un débat assez intéressant. Nous n'avons pas tous la même interprétation, certains y voient l'illustration de l'espoir évoqué par Diane. Pour ma part, je suis, disons, pour ne pas trop dévoiler, plus pessimiste. 

Ce film a reçu le prix du Jury à Cannes, mais même sans ça, je ne saurais que trop vous recommander d'aller le voir. 

 


8 commentaires:

  1. Je suis d'accord avec toute ton analyse. Au-delà des personnage de Steve et de Die, j'ai été très émue par celui de Kyla dont le drame familial est si dur...
    Une tornade à voir absolument!
    Bisous ma Sara et merci pour ce très beau billet!

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    1. Merci Danounette!
      Le drame de Kyla, ma copine ne l'avait même pas repéré, c'est dire si c'est subtil, comme malaise.

      Bisous!

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  2. tout à fait d'accord avec ce beau billet. Que dire de plus... Le cadre serré favorise et entretien cette ambiance où se mêlent et s'entrechoquent les sentiments. Les dialogues, le jeu d'acteur, sont d'une finesse chirurgicale. On est pris aux tripes (dsl cette remarque n'est pas très littéraire)!!! Le choix de la musique est lui aussi très opportun et jongle avec notre coeur durant les 2h de film. Les minutes défilent sans laisser apparaître le moindre signe de lassitude. Nous sommes avec ces trois personnes et nos sentiments se greffent aux leurs pendant toute la durée du film. Toute la panoplie des sentiments est abordée de la tristesse à la colère. Effectivement ce n'est pas un film à aller voir si on veut se vider la tête mais quelque soit notre état d'esprit en le découvrant on ne repart pas "indemne". L'histoire de Kyla, la fin laissent une interprétation assez libre pour le spectateur. Pour moi se sera plutôt une fin optimiste, sans doute la déformation professionnelle!!! Voilà ce n'est que mon avis mais quel film tabernacle!!
    Sandra

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    1. Merci pour ce long commentaire, copine!
      Tu dis exactement ce que je pense... ce n'est pas un film dont on sort indemne, ça c'est sûr.
      Ravie qu'il t'ait plu.
      Et j'aime ton optimisme, finalement tu es comme Diane "les sceptiques seront confondus".

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  3. je voudrais connaître le petit mot que dit Kyla à Diane à la fin du film. Pour moi elle lui dit que c'est une bitch et ne comprends pas que Diane à placer steeve car il voulait être l'homme de Diane. merci de me répondre. j'ai adoré ce film.

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    1. Bonjour à vous dont je ne connais pas le nom,
      Je ne vois pas bien de quel "petit mot" vous parlez, désolée.
      Je pense aussi que Kyla n'a pas compris la décision de Diane de placer Steeve (cela s'explique par le drame personnel qu'elle a vécu), mais de là à la traiter de bitch, je ne pense pas que ce soit cela.

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  4. Je suis un peu dégoûtée il n'est pas passé dans les cinémas près de chez moi, je voulais tellement le voir!!

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    1. Oh, c'est vrai? Mais c'est nul, ça!
      Purée, je comprends ta déception.

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