@Marion Pluss
Bon sang, mais qu'est-ce qui se passe?
A peine 30 secondes pour sortir de la rame et gagner la sortie, et le double pour monter un putain d'escalier?
Ses doigts pianotant d'impatience sur la rampe, Célia se hissa sur la pointe des pieds. De la dernière marche de l'escalier, tout se qu'elle pouvait voir, c'était deux silhouettes - plutôt vieilles, les silhouettes, à en juger par leur allure - qui freinaient à elles deux la progression du flux des voyageurs.
Allez, papi, s'te plait, aide mamie à grimper, qu'on n'y passe pas la journée...
Célia détestait tout ce qui paraissait avoir dépassé la date de péremption. Fringues, portable, mobilier, petits amis... tout chez Célia subissait le même sort. Elle se lassait vite et n'avait pas de temps à perdre. Il lui fallait du neuf, tout le temps.
Elle méprisait le reste.
La vue du chignon de "Madame-j'avance-à-la-vitesse-d'un-escargot" lui tira une moue de dégoût. Comment pouvait-on encore porter un truc pareil dans les cheveux? Ces gens sortaient tout droit d'une dimension parallèle et avaient été catapultés en 2015 dans le métro parisien dont ils tentaient péniblement de sortir!
Eh, mamie, l'heure de pointe, ça te parle? T'avais qu'à sortir avant. Ah non, pardon, le plan canicule, tout ça...
Agacée, Célia retira les écouteurs qui braillaient dans ses oreilles.
Elle lâcha la rampe, se déporta sur la gauche, pour contourner le couple, comme le faisaient tous les voyageurs devant elle.
Certains, plus perspicaces qu'elle, avaient anticipé ; ils se faufilaient et longeaient le mur depuis le bas de l'escalier jusqu'en haut, espérant atteindre la terre ferme plus rapidement.
Au moment où Célia atteignait les dernières marches, elle sentit qu'on la bousculait et qu'on la tirait en arrière.
Mais qu'est-ce que...
Elle fut déséquilibrée, ses talons de 12 cm ne permettant pas ce genre d'acrobatie.
En une fraction de seconde, elle fut projetée à terre, et, tandis qu'elle avançait les mains pour amortir la chute, on lui arracha vivement son sac.
Putain de merde! Aïe...
Célia ne se releva pas tout de suite. Elle était un peu sonnée.
- "Oh mon dieu, Mademoiselle, vous allez bien?"
- "Au voleur, au voleur, arrêtez-le!"
Elle leva la tête et découvrit le papi qu'elle maudissait quelques minutes plus tôt, penché sur elle, s'assurant qu'elle n'avait rien de cassé. Sa femme, elle, s'époumonait à s'en décoiffer le chignon, pour que quelqu'un poursuive le voleur.
Mais, des autres voyageurs, aucun ne s'arrêta. Chacun passait son chemin, évitant de baisser les yeux, comme si rien n'était arrivé.
Rêver de ce que l'on va écrire pour l'atelier du lundi, et ne plus s'en souvenir au réveil, c'est ballot...
Voici tout de même ma participation à l'atelier de Leiloona, "Une photo, quelques mots".
J'adore ! Tout ! Criant de vérité du début à la fin !
RépondreSupprimerMerki!!
SupprimerC'était pas ça que je voulais écrire au départ, mais finalement j'aime bien;
Le personnage de Célia est hyper réaliste et en même temps emblématique de notre temps ! Bravo !
RépondreSupprimerMerci Albertine!
SupprimerTrès bien vu ! les apparences ne sont jamais ce qu'elles semblent être. L'indifférence, la violence, les préjugés... très bien rendu ! merci :)
RépondreSupprimerMerci! Oui, j'avais envie d'aller vers cette idée un peu décalée.
SupprimerTellement réaliste du début à la fin !! Bravo !
RépondreSupprimerCe texte rend à merveille ce mépris qu'on peut tous avoir envers d'autres humains, qu'on se permet de juger rapidement selon des critères si superficiels ...
RépondreSupprimerOui, on le fait trop souvent, malheureusement.
SupprimerHey ouais ! Espérons que ça lui serve de leçon ! Non mais ...
RépondreSupprimerOuais, bien fait!!
Supprimervivent les papies-mamies :-)
RépondreSupprimerOui, comme tu dis.
SupprimerMême si, j'avoue, les retraités pas très rapides, qui ont toute la journée pour aller faire leurs courses et qui se pointent en même temps que toi qui sors du boulot... c'est grrr. lol!
J'aime beaucoup ton texte !
RépondreSupprimerJe pense que chaque personne ayant vécu à Paris se retrouve dans les premières phrases.
Pour ce qui est de la fin, les apparences sont souvent trompeuses et on ne peut jamais vraiment savoir si qui on peut compter en cas de problèmes !
Merci!
SupprimerOui, ça sent le vécu, dit celle qui a vécu à Paris pendant 5 ans!
Toute une époque ! Il est très bien écrit ton texte et j'ai cru jusqu'à la fin que c'était le papy qui lui avait arraché son sac !
RépondreSupprimerMerci!
SupprimerPour le papy, ah oui, c'est marrant, ça!